« Partout le réel doit perdre sa dimension d’altérité ou d’épaisseur sauvage : restauration des quartiers anciens, protection des sites, animation des villes, éclairage artificiel, « plateaux paysagers », air conditionné, il faut assainir le réel, l’expurger de ses ultimes résistances en en faisant un espace sans ombre, ouvert et personnalisé. Au principe de réalité s’est substitué le principe de transparence qui transforme le réel en lieu de transit, un territoire où le déplacement est impératif : la personnalisation est une mise en circulation. Que dire de ces banlieues interminables qu’on ne peut fuir ? Climatisé, sursaturé d’informations, le réel devient irrespirable et condamne cycliquement au voyage : « changer d’air », aller n’importe où, mais bouger, traduit cette indifférence dont est affecté désormais le réel. »
Lipovetsky, Gilles. L’ère du vide : essais sur l’individualisme contemporain. Gallimard, collection Folio essais, 1983. p. 107
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